A Capbreton on rêve toujours
La réunion publique se tenait aux allées Marines. La salle était pleine, on pourra subodorer la présence d’une claque au demeurant peu efficace.
La table était composée de 3 personnalités politiques représentatives de la commune (son maire M. Laclédère) et de Macs (président M. Kerrouche et vice président en charge du développement M. Froustey), plus le porteur de projet (directeur du Centre Leclerc). Le tout renforcé par la présence en salle du député local M. Dufau.
Nous avons eu une longue présentation à trois politiques du sujet, suivie de l’intervention du porteur de projet. La séance s’est poursuivie par la présentation d’un petit film publicitaire de 4 minutes, assez bien fait pour une publicité. La séance s’est terminée par un échange relativement mou et bref avec la salle.
Globalement le projet présenté consiste à déplacer le centre Leclerc, et l’enseigne les Briconautes, sur une zone actuellement protégée. L’objectif affiché est d’augmenter la surface commerciale, d’accueillir de nouvelles enseignes qui ne seraient pas en concurrence avec le tissu commercial du centre ville. Bien entendu, le projet présenté se ferait dans le respect le plus profond de l’environnement, tout en créant du développement et de l’emploi. Il permettrait également d’entraver une évasion de la clientèle vers les zones de chalandise de Dax ou Bayonne. Le projet participe des 6 ZACOM (Zone d’Aménagement Commercial) de MACS. Soit par des augmentations projetées de surfaces commerciales de Macs par extension (Leclerc Tyrosse, Leclerc Soustons, Leclerc Capbreton, serres d’Angresse, Super U de Messanges), soit par la création de la ZACOM Atlantisud au milieu de rien dite » Grozoziau « . Enfin, il faut noter l’extension déjà réalisée de l’Intermarché de Soorts Hossegor, avec la création d’un Bricomarché de bonne surface.
Une première impression se dégageait progressivement au cours de l’exposé à trois voix de nos politiques. La répétition à satiété des mots clefs, le ton particulier de ces répétitions donnait à penser que ce projet tant espéré par ces responsables politiques avait peu être beaucoup de plomb dans l’aile. Il y avait là quelque chose de l’ordre de l’inconscient qui parasitait l’exposé. Du reste, nous sommes restés dans le qualitatif, l’anecdotique. Aucune étude n’étant citée en appui des affirmations d’ordre général répétées jusqu’à la nausée. Le porteur du projet quand à lui nous a vendu son objet en bon commercial.
Le dernier paragraphe de la dernière diapositive était symptomatique. Il montrait le blocage actuel du projet par l’action des Amis de la Terre. Il en est vraisemblablement de même avec le SCoT de Macs, attaqué par la Sepanso.
Lors du petit nombre de questions de la salle, ce blocage des terrains est revenu à plusieurs reprises. Le président de MACS, comme le maire, n’ont jamais répondu clairement à la question du devenir du projet si le recours déposé par la commune auprès de la cour Administrative d’Appel de Bordeaux (CAA) échouait. On se contenta de déplorer la perte de temps et d’autres pistes sans plus de précisions.
Aucune étude ne vient appuyer ce projet, pourtant il en existe. Nous ne citerons que l’étude PIVADIS pour la CCI, PROCOS d’avril 2014, et plusieurs études de la CCI des Landes.
Nous savons par la CCI des Landes PIVADIS qu’il existe environ 600 000m2 de surfaces commerciales. La surface moyenne par habitant est supérieure à la moyenne française. Pour suivre la croissance espérée de la population landaise et la nécessité de renouvellement, le besoin serait dans les années à venir de 100 000 m2 supplémentaires. L’ensemble des projets accordés dépasse les 200 000 m2 soit plus de 200 % des besoins. Sur notre zone, l’inflation exagérée est flagrante, elle est de 600 % environ. Si nous en croyons les études de la CCI des Landes : « En effet, le nouveau supermarché de Soorts-Hossegor ou le projet d’Angresse sature déjà le marché à l’horizon 2018, en particulier dans l’alimentaire et le bricolage, sans même évoquer le projet de bricolage à Mées récemment autorisé, ni celui de Capbreton en cours d’émergence …et le potentiel de croissance se situe entre 16 et 26 millions d’€ correspondant à 7 000 m2 de potentiel « . Sur Macs, 41 000 m2 sont autorisés, mais 6 000 m2 ont déjà été consommés. « , alors que 6 000 à 7 000 seraient nécessaires -figure 1-.
-Figure 1- comparaison surfaces accordées et surfaces nécessaires source CCI 40
La responsable de cette incohérence serait la CDAC (Commission Départementale d’Équipement Commercial). En effet elle donne un avis dans lequel l’aspect économique ne peut pas être pris en compte. Elle est issue de la loi sur la modernisation de l’économie, elle juge selon un certain nombre de critères liés à deux familles :
L’aménagement du territoire :
- l’effet sur l’animation de la vie urbaine, rurale et de montagne l’effet du projet sur les flux de transport
- les effets découlant des procédures prévues aux articles L. 303-1 du Code de la construction et de l’habitation et L. 123-11 du Code de l’urbanisme
de développement durable :
- la qualité environnementale du projet
- son insertion dans les réseaux de transports collectifs.
Ah cette sacro-sainte concurrence libre et non faussée, une partie des investissements pourraient tout de même être public, et parfois bien camouflés.
Nos bons politiques nous ont abondamment détaillé la CDAC , sa composition et son avis unanime sur la validation du projet. Ils ont simplement omis de préciser ce qu’en disait le président de la CCI des Landes : » La loi de modernisation de l’économie, qui a écarté les CCI des Commissions départementales d’équipement commercial pour les transformer en commissions d’aménagement commercial « sans analyse économique, ni régulation » » De la jalousie de la part de la CCI diront certains, nous ne le croyons pas forcément.
Pour l’évasion commerciale, toujours selon la CCI, elle serait déjà négligeable sur la zone. » ..comprenant la zone Soustons, Hossegor-Capbreton, Tyrosse sont constitués de l’apport touristique. L’évasion y est faible … ».
De ces études, il n’en fut pas question. Toujours selon la CCI » L’enjeu de la dynamique commerciale des Landes consiste à favoriser une réelle création de richesses et d’emplois et non de décimer celles et ceux existants. »
En matière d’emploi, on nous annonce presque 200 emplois supplémentaires, c’est à dire un quasi doublement de l’existant. Bien entendu, un malveillant a demandé un peu de détails, les rames ont été de sortie. Aucune justification claire, comme d’habitude, vous êtes priés de croire. Les grandes surfaces commerciales sont bien les temples d’une nouvelle religion : « la consommation », il faut croire ce que ses grands prêtres vous disent.
Le devenir des anciens bâtiments a été évoqué. Tout d’abord, la cafétéria serait transformée en supérette. On se fait sûrement de la concurrence libre et non faussée. Pour le reste, ce sera de l’immobilier » accessible au plus grand nombre « . Ici nous touchons la langue de bois politique. Il s’agit donc vraisemblablement de logements sociaux, nous rappelons que le logement social est une nécessité, à tel point que plus de 70 % de la population de Macs y est éligible sous l’une ou l’autre de ses composantes. Mais parler de logement social n’est pas porteur. Encore une fois on prend les électeurs pour des débiles.
Il nous a été précisé que les enseignes qui intégreraient cette structure ne concurrenceraient pas le commerce local. Nous n’avons pas pu obtenir la liste des enseignes. Nous savons seulement qu’il n’existe aucune surface dédiée au sport sur Capbreton et Hossegor. Les commerces, entre autres de la zone Pédebert d’Hossegor, apprécieront (surf, bien sur, mais aussi magasins généralistes de sport, de vélos, de golf, de randonnée…) Ou nous avons affaire à des incompétents, ou l’on nous prend vraiment pour des imbéciles. Tout comme l’arrivée de Toys ‘R’us qui ne concurrencera sûrement pas les installations de la rue piétonne de Capbreton.
Et puis rien ne serait complet sans la touche environnementale. Nous ne reviendrons pas sur le fond, mais nous resterons sur l’anecdote significative de l’esprit. La deuxième et dernière enseigne annoncée pour venir s’installer sur cette zone est GIFI. Comme l’a simplement fait remarquer une participante, GIFI est vraiment l’exemple d’une enseigne du futur, écologiquement impliquée dans les produits durables, et locaux, comme chacun le sait. GIFI, c’est l’image du passé, de la consommation à outrance, du gadget jetable à bon marché, de la production lointaine dans des conditions sociales déplorables.
Le lecteur tirera lui même ses conclusions quant au grand intérêt de cette réalisation.
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